Le Comité de Pilotage Scientifique du Cancéropôle Nord-Ouest a retenu deux projets pour un montant de 100 000 euros chacun sur une durée de 18 mois. Toutes nos félicitations aux lauréats !
Le projet intitulé « Ciblage des capacités apoptotiques du récepteur MET comme nouvelle stratégie thérapeutique dans les cancers du poumon » – Acronyme Death Angel – porté par David TULASNE.
Les thérapies ciblées représentent une avancée majeure dans la prise en charge de nombreux cancers dont le cancer du poumon. Ces thérapies ciblent notamment les récepteurs à activité tyrosine kinase. Le récepteur MET, muté et activé dans le cancer du poumon, appartient à cette famille de récepteur. La première thérapie ciblée dirigée spécifiquement contre MET a été approuvée cette année en Europe pour traiter des patients atteints d’un cancer du poumon. Cependant, malgré l’espoir suscité, les thérapies ciblant MET sont moins efficaces que pour d’autres cibles. Dans ce contexte, le projet Death Angel a pour objectif d’améliorer la compréhension de l’activation de MET dans les cancers du poumon dans le but d’optimiser son ciblage.
Le projet scientifique est basé sur l’observation originale que le récepteur MET est capable d’induire la tumorigenèse via une résistance à la mort cellulaire par apoptose. Le projet implique donc une collaboration étroite entre une équipe Lilloise dirigée par David TULASNE et spécialisée dans la dérégulation de MET dans les cancers et une équipe de Caen dirigée par Laurent POULAIN spécialisée dans la régulation de l’apoptose notamment par les protéines de la famille Bcl-2. Cette complémentarité des compétences et les approches innovantes proposées permettront d’identifier les mécanismes moléculaires impliqués dans la résistance à l’apoptose induite par les formes activées de MET.
Le projet Death Angel propose également d’instrumentaliser ces nouvelles connaissances pour développer des stratégies thérapeutiques innovantes. Ainsi, en complémentarité avec les thérapies ciblées classiquement utilisées, le projet propose de contrecarrer la survie induite par MET en poussant les cellules vers la mort cellulaire. Cette étape du projet sera réalisée en collaboration avec une équipe de chimistes de Caen dirigée par Anne Sophie VOISIN-CHIRET. Cette équipe développe notamment de nouveaux types de composés, les PROTACs, qui ont la propriété d’induire spécifiquement la dégradation d’une protéine par son ciblage vers le protéasome. Cette technologie est particulièrement adaptée pour faire basculer une cellule vers l’apoptose en perturbant l’équilibre entre les protéines de la famille Bcl-2.
Ainsi ce projet structurant et multidisciplinaire du Cancéropôle Nord-Ouest renforcera les interactions et les échanges entre trois équipes aux compétences complémentaires dans le but d’améliorer la prise en charge des patients atteins d’un cancer du poumon. Les connaissances acquises pour ce cancer et la mise en place de nouvelles stratégies thérapeutiques telles que celles basées sur les PROTACs pourront être déployées dans le CNO pour d’autres cancers.
Dr David TULASNE (UMR Canther, Lille), Dr Laurent POULAIN (Inserm U1086 Anticipe, Caen), Pr Anne Sophie VOISIN-CHIRET (CERMN, Caen)
Le projet STRATEGIC « STRucturation de l’Analyse des Transcrits dEs Gènes Impliqués dans les Cancers héréditaires en Normandie et Nord-Pas de Calais », porté par Claude HOUDAYER.
Le projet STRATEGIC a pour objectif d’organiser et structurer l’accès des analyses conjointes ADN/ARN aux patient.es. vu.es en consultation d’oncogénétique sur les sites de Caen, Lille et Rouen.
Le diagnostic moléculaire par séquençage haut débit est devenu indispensable à la prise en charge oncogénétique car il permet d’identifier les personnes à risque, de guider la surveillance, d’orienter la chirurgie préventive et les traitements. La qualité de cette prise en charge dite « de précision » repose sur la qualité de l’interprétation des variants génomiques identifiés. Ainsi, les anciennes problématiques de production de données ont aujourd’hui cédé la place à des questionnements aigus sur nos capacités d’interprétation de cette masse de données générée.
Cette évolution d’un défi de production vers un défi d’interprétation impose le déploiement d’analyses complémentaires ou tests fonctionnels dont le but est de caractériser l’impact d’un variant génomique sur la fonction du gène et in fine son implication ou non dans le phénotype tumoral.
Il faut savoir que chaque variation nucléotidique intra-génique peut altérer l’épissage du pré ARN messager. Ajoutons que des variations dans le promoteur des gènes ou dans leurs régions régulatrices peuvent altérer quantitativement leur expression. En conséquence, caractériser l’impact des variants du génome sur le niveau d’expression des gènes ainsi que sur leur profil d’épissage est une démarche indispensable à l’interprétation. Nous allons donc organiser et structurer l’accès en routine de ces études aux patient.es. Les analyses de transcrits seront réalisées sur les 3 sites (Caen, Lille et Rouen) selon un circuit concerté et une méthodologie commune, ceci afin de répondre aux exigences d’un maillage territorial par des équipes expertes en post séquençage.
L’analyse génomique se fera en panel de gènes sein/ovaire ou digestif, selon les recommandations nationales en vigueur. Afin de prédire un possible impact sur l’épissage, l’ensemble des variants intra-géniques détectés sera analysé in silico à l’aide du méta prédicteur SPiP et du prédicteur Splice AI. Au niveau transcrits, une nouvelle approche combinant analyses d’expression et d’épissage ciblée à haut débit en panel de gènes sera d’abord employée. Puis, en fonction des résultats, une combinaison de RT PCR Sanger, minigène ou RNAseq sera déployée. L’interprétation des données se fera de façon collégiale sur les trois sites.
Cette stratégie augmentera donc le nombre de diagnostics de prédisposition héréditaire au cancer, fera reculer l’héritabilité manquante, définira l’efficacité des prédictions in silico, fournira de nouvelles données sur les relations génotype-phénotype et posera les bases d’un circuit innovant à basculer en diagnostic.
Pr Claude HOUDAYER, Inserm U1245, CHU de Rouen
Partenaires :
– Pr Marie-Pierre BUISINE (CHU de Lille, UMR 9020 CNRS – UMR-S 1277 Inserm),
– Dr Dominique VAUR (Inserm 1245, CLCC Baclesse, Caen)
– et Dr Philippe RUMINY (Inserm 1245, CLCC Becquerel, Rouen)